Pierre-Félix Masseau dit « Fix-Masseau » est né à Lyon en 1869.

Élève à l’école des beaux-arts de Lyon, il reçoit une bourse afin d’étudier la sculpture dans l’atelier de Gabriel-Jules Thomas à Paris où il reste de 1889 à 1893, tout en suivant les cours de l’école des beaux-arts.

Dans les années 1890, il fréquente les cénacles des écrivains symbolistes. D’une personnalité excentrique, il n'hésite pas à se travestir en Christ et vit retiré du monde, ne fréquentant que quelques cercles d'avant-garde. Ses aventures féminines (notamment avec Mina Schräder de Nyzot, ancienne égérie de Remy de Gourmont) défraient alors la chronique.

Les sculptures qu’il envoie au Salon des artistes français, entre 1890 et 1892, sont remarquées par Auguste Rodin. Il expose sous le nom de Fix-Masseau et devient rapidement une des principales figures de la sculpture symboliste. Le président de la Chambre de commerce dit de lui au directeur des Beaux-Arts de Paris, en mai 1894, qu'il « est un peu influencé par notre compatriote, le bizarre et puissant Jean-Joseph Carriès, mais il a vraiment un tempérament à lui, et beaucoup de sève ».

Marqué par les expérimentations céramiques de Carriès, il contribue au rapprochement entre la céramique et les arts décoratifs. En 1895, son œuvre ‘Emprise’ consacre sa renommée. Les symbolistes voient en lui le sculpteur de la névrose et de l'invisible ; les masques, les têtes d'expression, les figures féminines deviennent le support d'une exploration intérieure de l'âme. 

Il expose régulièrement ses travaux sur des matériaux très variés : cire polychrome, marbre, bronze, bois, ivoire et céramique. Il commence également à réaliser de nombreux masques mortuaires de personnalités marquantes de l’époque.

«L’artiste semble être descendu jusque dans les profondeurs de l’âme humaine pour nous révéler son désespoir » commentaire de la revue The Artist sur l’œuvre ‘Le Passé’ exposée en 1897 au salon de la société nationale des beaux-arts.

Au début du XXe siècle, son talent reconnu lui permet d’entamer une carrière d’artiste officiel et d’être élu en 1904, puis 1907, 1910, 1914 et 1920 à la commission d’examen de la société nationale des beaux-arts dont il finira par devenir le secrétaire.

En 1908, il se voit nommé directeur de l’École nationale d’art décoratif de Limoges et du musée national Adrien Dubouché, poste qu’il occupera jusqu’en 1934.

Il sera chevalier de la légion d’honneur en 1907 et officier en 1926.

Pierre-Félix Masseau s’éteint à Paris le 14 avril 1937, il est inhumé à Herqueville.

Directeur de l’ENAD Limoges de 1908 à 1934

Après le décès d’Auguste Louvrier de Lajolais, Fix-Masseau est nommé directeur de l’École nationale d’art décoratif de Limoges et du musée national Adrien Dubouché.

Ses responsabilités sont donc largement moins étendues que celles de son prédécesseur qui dirigeait également les ENAD d’Aubusson et de Paris.

Il s’agit là d’un changement radical d’organisation par rapport à l’approche de centralisation qui avait primée depuis la création de l’école en1881, significatif d’une volonté politique de redonner à Limoges une certaine autonomie.

Le profil du nouveau directeur est également fort différent de celui de son prédécesseur. Autant Louvrier de Lajolais représentait le bras armé pour les Arts Décoratifs de la grande réforme centralisatrice de l’enseignement voulue par Jules Ferry et Jules Grévy, et à ce titre bénéficiait d’appuis politiques importants dans la capitale ; autant Fix-Masseau, artiste reconnu mais sans expérience d’administrateur et sans connaissance du monde de l’industrie de la porcelaine, ne se retrouvait soutenu à Paris que par les quelques membres du ministère des Beaux-arts qui avaient proposé sa candidature.

À Limoges, bien que nombre de contremaîtres, de chefs d’ateliers et de patrons de fabriques limousines soient d’anciens élèves de l’ENAD, bien que l’école ait remporté de nombreux prix aux expositions, les industriels de la porcelaine considéraient l’enseignement de l’ENAD pas suffisamment approprié à leur besoins professionnels afin de permettre aux élèves de travailler directement au sein de leurs manufactures (voir pages 375-378 de l’ouvrage de Pierre Grellier ‘L’industrie de la porcelaine en Limousin’ publié en 1909).

L’arrivée de Fix-Masseau à la tête de l’ENAD Limoges et du musée marque un tournant pour l’école qui s’oriente vers un enseignement purement artistique encore moins tourné vers l’industrie, ce qui représentait pourtant l’essence même de son identité de départ.

Par ailleurs, la personnalité indépendante d’artiste total de Fix-Masseau l’éloigne des préoccupations locales de Limoges, ville où il ne séjourne que par nécessité professionnelle, préférant se retirer dans sa maison à Herqueville, que dès 1908, l’industriel Louis Renault met à sa disposition dans son domaine de Normandie en bordure de Seine.

Cependant, une ultime tentative d'adaptation de l'enseignement de l'école aux besoins de l'industrie porcelainière, proposée par Georges Haviland, se concrétisera en 1913 avec la création d'une section dédiée à la céramique, traitant les aspects artistiques et techniques, et placée sous la direction du peintre Frédéric Robida (1884-1978).

Mais cette organisation ne durera guère, elle sera vite interrompue par la grande guerre (les bâtiments de l'école sont transformés en hôpital militaire durant le conflit) et ensuite peu à peu se retrouvera délaissée pour finalement être remplacée en 1933 par une nouvelle section céramique créée à l'Ecole Nationale Professionnelle située au lycée Turgot. 

Après la guerre, Fix-Masseau s’efforcera de renouveler l’enseignement artistique pour anticiper l’avènement des formes esthétiques qui conduiront à l’émergence du style Art déco.

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